Le coliving va-t-il bouleverser le marché de l'immobilier ?
Né sur la côte ouest des États-Unis dans les années 2000, le coliving se développe à New York, Londres, Berlin, Tokyo. Le concept ? Des résidences de colocation offrent un ensemble de services mutualisés. Face à ce phénomène de plus en plus à la mode, les acteurs de l’immobilier devront-ils revoir leurs offres pour s’adapter ? Éléments de réponse.
Qu’est-ce que le coliving ?
Après la démocratisation du coworking, c’est au tour du coliving d’émerger sur le marché immobilier. Né dans les années 2000 aux États-Unis, plus exactement dans la ville de San Francisco, ce phénomène offre à la fois des logements “clés en main” et l’occasion de nouer des liens. À New York, Londres, Tokyo, Berlin… les immeubles voués au coliving se multiplient partout à travers le monde. En France, l’entreprise Lime a été précurseure dès 2017, en proposant des lieux dédiés au coliving en plein centre-ville de Bayonne. Depuis, elle a été rejointe par de nombreuses start-up, telles que Colonies, la Casa, Ecla, The Babel Community ou encore Flatmates de la Station F.
Le concept pourrait être qualifié de colocation 2.0, à mi-chemin entre la prestation hôtelière et le logement traditionnel, auquel s’ajoutent divers services. Chaque résident et résidente dispose d’un espace personnel privé – allant d’une simple chambre à l’appartement entier –, mais aussi d’un accès à des espaces partagés entièrement meublés. À cela s’ajoutent divers services collectifs comme l’entretien, les installations sportives, le personnel de nettoyage et de sécurité.
Un essor qui accompagne les modes de vie des jeunes actifs
Au-delà de ces prestations de services, l’un des points forts du coliving consiste à réunir des personnes au sein de ces habitations autour de passions communes. Ainsi, certaines résidences proposent des thématiques spécifiques, à l’instar de la Casa des Chefs axée sur l'art de table. Cette résidence propose notamment “un jardin condimentaire, un barbecue extérieur, une cuisine suréquipée ou encore une cave à vin”... Bref, le coliving s’adapte à tous les goûts, et inaugure de nouvelles manières de vivre ensemble.
Si l’idée de lieu de vie communautaire n’est pas nouvelle – d’aucuns évoquent ainsi le modèle du phalanstère de Charles Fourier, conçu au début du XIXe siècle dans un esprit un peu similaire –, le public visé par cette relecture de la cohabitation a bien évolué. Il s’adresse désormais à de jeunes travailleurs nomades qui affrontent le problème de l’accès au logement, particulièrement dans les grandes métropoles aux loyers prohibitifs.
“C'est une tendance de fond à l'heure où le logement est inaccessible, où on est de plus en plus nomade… Cela répond aussi à une forme d'isolement dans les grandes villes. Il y a une grosse demande du marché », précise Kevin Cardona, directeur de l'innovation chez BNP Real Estate au quotidien Le Parisien.
Mais s’agit-il là d’une réponse adéquate à la crise du logement ? Les avis divergent. Certains célèbrent la flexibilité qu’offre ce type de résidence – la durée moyenne d’une location en coliving est évaluée à seulement dix mois. D’autres, à l’image du quotidien britannique The Guardian, estiment que ce phénomène exploite les vulnérabilités de la génération Y confrontée aux difficultés à se loger, mais aussi à la solitude.
Un modèle qui attire l’intérêt des investisseurs
Le concept attire de plus en plus les investisseurs immobiliers, grâce à sa promesse de dynamiser le secteur immobilier et l’organisation de la ville en général. En mars 2020, la start-up Colonies a, par exemple, annoncé une levée de fonds de 180 millions d’euros. “Un montant rare pour une start-up immobilière. Un univers dans lequel les levées de fonds les plus élevées se comptent plutôt en millions ou en dizaines de millions d’euros”, comme le rappelle l’Agence France-Presse.
Une nouvelle donne pour les agences immobilières ?
Dans les faits, le marché est encore embryonnaire. Selon une étude publiée par la filiale immobilière de la banque BNP Paribas en 2019, il représente quelque 5 000 places en France, avec plus de la moitié des lits dans les communes de la petite et de la grande couronne de Paris. De quoi s’interroger sur un possible avenir où les agences immobilières géreront des abonnements à des services, plutôt que de vendre ou louer des mètres carrés. Pour l’instant en tous cas, nous en sommes loin